MIEUX COMPRENDRE POURQUOI AVS 21 N’EST PAS UNE BONNE SOLUTION

L’AVS est l’un des piliers fondamentaux de notre système social. Elle est l’une des conquêtes sociales majeures née du mouvement revendicatif des salarié·es début du 20e siècle. Elle cumule les avantages d’être solidaire, de fonctionner par répartition et d’être gérée de façon transparente par l’État. Ces particularités ont de tout temps horripilé la droite qui, après avoir largement échoué dans son référendum contre sa création en 1947, n’a cessé de chercher à l’affaiblir.

La majorité de droite et le Conseil fédéral ont dramatisé le déficit de l’AVS, argument qu’ils nous resservent depuis des années et que nul n’est obligé de croire. L’AVS ne va pas mal (elle a clôturé avec un excédent de 2,6 milliards en 2021). En faisant de cette contre- réforme un instrument de guerre entre générations, ils entendent diviser les classes populaires, touchées frontalement par cette révision. La flexibilisation de l’âge de départ à la retraite jusqu’à 70 ans va toucher en effet essentiellement les bas salaires qui seront contraints de travailler plusieurs années de plus et parmi eux une majorité de femmes.

Il est incontestable que les rentes AVS doivent être augmentées afin que l’AVS remplisse sa fonction inscrite dans la constitution, qui est celle de couvrir les besoins vitaux de manière appropriée. L’AVS doit donc être renforcée.

Le modèle de l’AVS est efficace et rentable, et profite aux assuré-e-x-s, contrairement au 2ème pilier, dont le système de capitalisation aboutit à une énorme fortune qui représente une mine d’or pour la gestion par les banques et les assurances, avec tous les coûts sociaux et environnementaux que cela implique. Le principe des retraites par répartition peut et doit être pérennisé et renforcé, dans le but de protéger les plus précarisé-e-x-s– les femmes et les travailleur-se-s dont la pénibilité raccourcit statistiquement l’espérance de vie.

Des solutions ambitieuses et socialement justes pour renforcer l’AVS, il y en a à foison et elles ont largement été exposées. Il est temps par exemple d’interroger un système qui ne prélève ses cotisations que sur le travail. Les revenus du capital ont explosé au cours des dernières décennies et il ne serait pas inutile de les mettre à contribution. Comme chacun sait, la Banque Nationale produit des bénéfices inouïs qu’il serait opportun de redistribuer à la population, par exemple par le biais de l’AVS. Malgré les baisses fiscales, les comptes de la Confédération sont systématiquement noirs et l’on pourrait imaginer qu’elle contribue au financement de l’AVS dans une mesure plus large qu’aujourd’hui.

La droite au Parlement fédéral a finalement adopté AVS 21 en décembre dernier et ainsi décidé de relever l’âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans et d’introduire une flexibilisation du départ à la retraite jusqu’à 70 ans. La majorité parlementaire affiche son mépris des mobilisations de la Grève des femmes et de la forte opposition des salarié.es manifestée notamment par les plus de 300’000 signatures de la pétition «Pas touche aux rentes des femmes!». Elle tente de forcer le passage après les refus en votation populaire, en 2004 sur la 11e révision de l’AVS et en 2017 sur la Prévoyance 2020, qui contenaient déjà les éléments antisociaux repris par la droite et le Conseil fédéral dans AVS 21:

AVS 21 attaque les femmes!

AVS 21 impose une triple peine pour les femmes. Cette contre-réforme les force à travailler un an de plus pour la même rente, alors qu’elles reçoivent des salaires et des rentes inférieures à celles des hommes et qu’elles exercent le plus souvent les métiers les plus précaires et les plus mal rémunérés.
L’écart global des revenus entre hommes et femmes en Suisse est d’environ 100 milliards de francs par an, alors que les femmes travaillent autant que les hommes. Cet écart est dû principalement à la répartition inégale du travail non rémunéré, en particulier des tâches éducatives et de soins. Cet écart s’accroît d’ailleurs pour les femmes entre 55 et 64 ans, une différence de revenu parmi les plus élevée en Europe. En 2016, les femmes en Suisse travaillaient 3010 millions d’heures rémunérées contre 4823 millions d’heures pour les hommes, alors que leur travail non rémunéré était de 5667 millions d’heures contre 3578 millions pour les hommes.

Par ailleurs, une femme sur quatre occupe une profession pénible qui peut entraîner des maladies et des accidents. Il s’agit des métiers de la santé et de l’action sociale : hôpitaux, EMS, institutions pour personnes handicapées, crèches et accueil de la petite enfance, etc. Les femmes sont donc exposées à un fort risque d’arriver à la retraite en mauvaise santé, une discrimination qui s’ajoute à d’autres pour nombre de femmes qui arrivent à la retraite ; ainsi en 2019, un quart des retraitées ne touchaient pas l’AVS et un tiers n’avait pas de 2e pilier.

La discrimination salariale persiste, et selon les derniers chiffres, elle a même augmenté. Si seulement l’écart salarial «non expliqué» était éradiqué, les cotisations supplémentaires versées à l’AVS sur la période de 2023-2031 seraient d’environ 10 milliards de francs. C’est le même montant qui serait économisé sur le dos des femmes en les faisant travailler un an de plus. Les employeurs empochent pour ainsi dire, non seulement une partie du salaire des femmes, mais également des cotisations à l’AVS ! Et ce serait encore aux femmes de payer?!

AVS 21 attaque la majorité des assuré·es!

Les personnes fortunées partent aujourd’hui bien souvent à la retraite à 60 ans avec des rentes de 2e pilier deux fois plus élevées que celles des assuré·es qui sont les principales victimes d’AVS 21. Au lieu de revaloriser les rentes, la droite veut que la majorité des salarié-e-x-s travaillent 5 à 6 ans de plus pour les augmenter. Les retraites sont déjà insuffisantes pour beaucoup d’assuré-e-x-s.

Contrairement à ce que prévoit la Constitution fédérale, les rentes de l’AVS ne couvrent pas les besoins vitaux de manière appropriée, avec une rente minimale de 1’195.- et maximale de 2’390.-. En comparaison, un appartement de 3 pièces se loue aujourd’hui en moyenne, sans les charges, 1’509.-. Il n’est donc pas surprenant que 223’000 retraité·es à l’AVS, soit plus que le nombre d’habitant.es de la Ville de Genève, doivent solliciter des prestations complémentaires.

AVS 21 va contraindre des assuré-e-x-s qui souvent n’en peuvent plus bien avant 60 ans, à continuer un travail qui les use. AVS 21 leur vole des années de retraite dont elles et ils pourraient profiter en étant en bonne santé, au profit des plus riches qui vivent beaucoup plus longtemps et qui ne veulent pas débourser un centime de plus pour cette assurance sociale.

L’espérance de vie et surtout la capacité d’arriver à l’âge de la retraite en bonne santé varient fortement selon la classe sociale à laquelle on appartient. En Suisse, l’espérance de vie en bonne santé à la naissance est de 70 ans environ pour les hommes et pour les femmes. Les hommes de 30 ans avec un bas niveau de formation ont une espérance de vie de 4 ans inférieure à celle de leurs contemporains qui ont une formation universitaire. Pour les femmes de 30 ans, elle est de 1,3 ans inférieure. Les mauvaises conditions de travail ont évidemment un impact majeur sur la santé et sur la capacité de chacun-e d’arriver à la retraite, lorsque l’on sait que 45% de la population active est exposée à un cumul d’au moins trois risques physiques dans leur travail, la flexibilisation de l’âge de la retraite jusqu’à 70 ans laisse songeur. Travailler jusqu’au tombeau, c’est non!

AVS 21 sert les intérêts des employeurs, des ménages fortunés et des assurances privées!

Les élu-e-x-s de droite représentent les intérêts de personnes fortunées qui peuvent prendre leur retraite bien avant 65 ans, et des assurances qui sont les grandes gagnantes de cette contre-réforme. Celles-ci pourront vendre massivement leurs assurances-vie qui souvent sont de vraies arnaques.
Les grands gagnants d’AVS 21 sont tout d’abord les employeurs. La droite et le Conseil fédéral ont refusé d’augmenter les cotisations sociales pour maintenir le niveau des rentes. 0,9% aurait suffi. Les assurances privées profiteront aussi d’AVS 21. Elles pourront vendre des polices pour permettre à celles et ceux qui peuvent se les payer de partir plus jeunes à la retraite.

AVS 21 augmente la TVA antisociale, alors même que plusieurs cadeaux fiscaux ont été faits aux plus riches!

En augmentant en plus la TVA, la droite a aussi décidé d’épargner les ménages fortunés. La TVA impose les dépenses de consommation. Les ménages qui doivent dépenser tous leurs revenus pour couvrir leurs besoins paient la TVA sur l’entier de leurs revenus, contrairement à celles et ceux qui peuvent épargner et aux grandes fortunes. En Suisse, les écarts de fortune sont très importants. Moins de 6% de la population possède plus de 66% de la richesse, tandis que plus de la moitié des habitant-e-x-s a une fortune inférieure à 50’000 francs. Un quart de la population n’a pas de fortune du tout.
Plusieurs cadeaux fiscaux ont été faits à ces 6% les plus riches. La 2e réforme de la fiscalité des entreprises a été acceptée à une courte majorité en votation populaire (2008) sur la base d’une projection de ses conséquences budgétaires très nettement sous-évaluées par l’ancien Conseiller fédéral Merz. Elle a des effets néfastes sur l’AVS puisque des propriétaires d’entreprises, autrefois salarié·es, ont décidé pour bénéficier de ces exonérations de se verser des dividendes plutôt que des salaires. Or, les revenus du capital ne sont pas soumis aux cotisations du 1er pilier, ce qui entraîne des pertes estimées à 150 millions de francs par année pour l’AVS.

La TVA ne touche en outre pratiquement pas les entreprises. En 1995, lors de son introduction, la TVA s’est répercutée à 75% sur les consommateurs-x-trices.

VOTEZ et faites voter 2x NON à AVS 21 et à l’augmentation de la TVA!

À la population de gagner la seconde manche dans les urnes, comme elle l’a fait en 2017 en refusant Prévoyance 2020 (PV 2020)!